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"What the fuck" (Orléans) - automne 04 -
Il existe des groupes uniques : leur démarche, leur son, leur longévité, leur créativité les placent direct au dessus du panier à crabes. Quand ils ont l'avantage d'être attachants, déterminés et généreux, on touche à l'exception ; pourquoi tant d'engouement pour un groupe qui est méconnu ? parce- que justement ils le sont, et injustement en plus ! Ils sont inclassables ce qui dérange, notamment les gens qui ont besoin de repères pour chercher à comprendre une musique: leur force aux Double, c'est de la vivre leur zique. J'ai croisé leur route plusieurs fois déjà, et souvent je me dis pas encore assez. Je ne cesse de remarquer leur abnégation à passer au-delà des épreuves, et toujours avec le sourire. Oui, la longue route du rock' n'roll est semée d'embûches mais si on sait la prendre, elle est la plus généreuse dans ce qu'elle réserve comme bonnes surprises. Et une rencontre avec les Double, Gaze et Pasc, en est toujours une : une semaine de tournée en Italie normalement furieuse entre autre, avec un mal à la mâchoire d'avoir ri (sans dec). Ils tournent régulièrement et discrètement, jamais eu de grosse structure, de major, et pourtant leurs albums s'écoutent aux Etats-Unis, au Japon, en Europe jusque centrale, et ca joue, tout à la main, à l'ancienne: pas d'intermittence mais tout à fond. Car la force de ce qu'ils font c'est la richesse humaine.
Ils ont démarré à 3, jouent à 2 depuis quelques années, en utilisant grandement les machines car leur vie est citadine, urbaine. Ils ont sorti 7 albums en comptant un mini, avec toujours des pochettes terribles composées sur du rêve un peu angoissant, ou de la science fiction un peu bizarroïde. On retrouve bien cet univers sur scène mais avec une bonne grosse dose d'humour, allant jusqu'à taper des défis. C'est important de déconner sérieusement. C'est dans ce contexte sans cesse renouvelé que j'ai eu l'occase de poser quelques petites questions pour illustrer ma position vis-à-vis d'eux et donc de leur formation puisque c'est un tout, unique, puissant et sans complexe; une chronique disait : "musique inclassable, c'est pour ça qu'il n'ont rien à perdre même pas une étiquette aussi respectable soit-elle ; c'est peut-être pour ca qu'ils paraissent invulnérables". C'est pas tous les groupes qui peuvent se vanter d'avoir d'une description comme ca,non ?
- la formule double ?
Gaze : les concerts toujours en doublette, pas de réembauche de personnel : la formule classique, c'est basse-batt, voire 2 basses, 2 guitares, ou percus-batt. En fait on est rythmique grave.

- le style double ?
Pasc : On fait du Double ! On sait ce qu'on fait pas...mais c'est pas sombre ; sur disque oui, mais sur scène non, on a plutôt tendance à bien rigoler.
G : Les racines, le style, ca fait 18 ans qu'on les a digérés. C'est plutôt indus, juste pour le côté urbain. Nancy nous a influencé pour le côté frontalier, il y a plein d'échanges avec l'est, notamment à l'époque où on a démarré, c'était la musique industrielle et ca nous a méchamment imprégné. Y a pas de démarche intellectuelle dans DN, on est rock, et y a des questions qu'on ne se pose pas. On fait tout ca parce-qu'on aime ca et on s'en fout du reste. C'est pour nous et ceux qui nous écoutent.

- la scène par rapport aux disques, c'est comment ?
G : Pour 80% de notre production discographique, c'est enregistré à l'appart, au casque ; donc après tu te retrouves sur scène avec des amplis, une batterie, faut remanier la chose pour générer des sons faits par deux personnes. Les disques sont plus sophistiqués, plus ambiants, et sur scène c'est plus brut, plus minimaliste, avec du son parallèlement à ce qu'on fait mais on est beaucoup plus bruyants que la machinerie. Le but du jeu c'est de prendre plus de place que les machines. that's live !

- et la déco sur scène et dans la salle ?!
G : On est que deux sur scène, alors la déco c'est la grosse ingénierie : ca prend de la place mais toujours en arrière plan, c'est là pour emmener et ca fonctionne à fond quand tes yeux collaborent à te faire rentrer dans ces histoires sans parole.
C'est le gars qui nous fait les pochettes, Manu, qui s'occupe de peindre les toiles qui sont dans la salle. Ce sont des choses assez ambiantes, climatiques, comme si tu retranscrivais ce qui se passait dans un microscope à une échelle super-balaise.
(un lot de toiles super grandes, genre 4m x 6m en un nombre conséquent, suffisant pour habiller une grande salle dans son ensemble : le but à atteindre, faire que le public quand il pénètre le lieu ne le reconnaisse pas, et qu'il se trouve d'entrée plongé dans l'univers des Double. C'est à peu près 4 heures de montage par date avec vraiment une sensation particulière de plaisir quand tu vois la gueule des gens qui t'accueillent te dire au fur à mesure que tu installes, c'est géant ! - Ndr).

- parlez nous de votre site qui est riche à mort (avec visite de l'appartement pour découvrir le lieu d'existence des Double !).
G : des vidéos de potes et de nous. Tu sais on emprunte une caméra et c'est parti, on développe une idée; c'est facile à faire. Et puis y a les histoires du Pasc : c'est des fois sans queue ni tête. C'est drôle avec un mélange d'univers étranges et SF. C'est le produit de son cerveau malade !
(Et puis y a matière à voir, écouter, et poss d'acheter la disco totale des Double - Ndr).
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- vous êtes en résidence au Magasin 4 à Bruxelles, dites nous ce que vous y mijotez ?
Le magasin 4 c'est un lieu autogéré (but really not a squatt), on y a joué à l'ouverture il y a dix ans, le 17 septembre on y joue pour les 10 ans de la salle (et 10ème concert dans les murs).
On est posé ici 2 mois pour notre prochain disque, construction complète, et ca fait 4 étés passés ici sur dix années. C'est une histoire de coeur, de famille, le temps est fluide et chaleureux, on est entourés comme des amis de longue date. C'est la douce vie, sauf je me suis coupée au pouce droit (4 points de suture) en délivrant un combat avec un verre la veille de mon annive.
Bilan du caillon, ôtage des fils jusqu'à l'attaque de la basse. Mais c'est pas grave. y a plein de trucs bien dans cette nouvelle zic ; mais vu le manque de local on va juste essayer à Nancy de peaufiner pour sortir quand même un p'tit truc en mai, un maxi, j'en sais rien, on verra bien.
On a l'over patate, tout le monde ici est délicieux, l'endroit est trop classe, on se fend la gueule à fond.
En attendant qu'on m'enlève les fils je me suis penchée sur la déco de scène, j'ai acheté plein de tissus et on planche sur les lights avec Ludo qui est arrivé samedi, je viens d'aller voir en bas (les bureaux sont au-dessus de la scène) : il vient d'installer la déco, on peut faire un truc avec ces tissus, faut plancher pour que l'ambiance un peu théâtrale qu'ils impriment prenne une grosse claque dans la gueule, rester roots mais nobles, faut bosser, faut éviter les pièges, faut sublimer humblement, faut s'y sentir à l'abri. Voilà ca va être ca mon boulot des huit jours de convalescence qu'il me reste.

- et pour la suite, royale ?
Le Jo (pote, producteur des derniers squeuds et du dvd - ndr) est venu vendredi dernier nous amener le dvd, il est class, j'en ai déjà vendu un bon paquet autour de moi, on est more than satisfied. Va falloir assurer un fût pour fêter ca, trouver un écran et tout le tintouin et ca refera une java de plus.
Fin avril la petite tournée un peu cossue avec Hightone devrait se faire, on va tâcher d'avoir la nouvelle petite pièce à vendre (maxi+dvd dans la même boîte=projet en cours), peut-être qu'on aura deux/trois live enregistrés par le matos Jarring entre 9 et le 21 novembre, et qu'il y aura un autre cd dans le petit paquet envisagé pour cette tournée. Les concerts ca commence le 16 septembre en Belgique puis Hollande, retour effectif à la maison le 27 septembre, ca fera 3 mois qu'on sera partis ... parait que le loyer a augmenté.
Depuis la première tournée est effectuée et le dvd (2h30 magnifiques) sorti, alors surveillez la route, ils sont dessus, et ils ont fait "peut-être moins de stations service que Prince mais plus que les Sex Pistols".
> DVD : "Double Nelson und Mogalito H. Ramm : la somme des faits ne peut dépasser la quantité du tout" contacter www.doublenelson.fr.st
(propos recueillis par Shoï)

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"Abus Dangereux" (Bordeaux) - mai/juin 03 -

Catch us if you can !
Seize ans que DN squatte la scène underground de l'underground. Une durée presque égale à celle d'Abus. Pourtant ni Gaze ni Pasc n'avait jamais pris la parole dans ces colonnes. L'erreur est réparée à la faveur d'une venue récente du duo à l'Inventaire au Mans. Du duo de quoi d'ailleurs ? Aïe, la colle. Définir la musique des nancéens est aussi périlleux qu'escalader le Servin par la face nord à mains nues. Alors ne comptez pas sur moi pour m'y risquer. Mais il y a une jolie formule sur leur feuille de présentation : "un genre de jazz perso à part que c'est pas du jazz". Ah, ca ne répond pas à la question ? Tant pis car aujourd'hui, c'est Gaze, moitié féminine du groupe, qui y répond, aux questions ...

La Ballade
Depuis un bout de temps nos tourneurs à l'étranger (DN a joué en Suisse, Hollande, Belgique, Italie Allemagne, Angleterre, Suède, Autriche, République Tchèque, Slovaquie, Hongrie) ont arrêté le booking, ca c'est donc sérieursement calmé hors héxagone, on essaie de se recentrer sur la France depuis une bonne année.. wait and see.

Indoor
Le barda qu'on trimbale nous permet d'improviser selon la configuration des lieux. Nous avons eu une décoration de scène dès le départ. Puis les fonds de scène sont devenus des décors de salle, on essaie toujours d'habiller la salle avant d'y jouer. C'est très égoïste : on veut se construire une chambre où on se sente bien. C'est comme une préparation mentale mais au moment du concert, tu es bien chaud, tu es dans l'affaire. Cette histoire de déco suppose un régime plutôt ardu car les nuits sont courtes. Après la fermeture il faut vider son truc et, pour avoir le temps de mettre en place l'histoire sur la date qui suit, on doit arriver le plus tôt possible à la salle du lendemain. Epuisant mais vital pour nos têtes.

Looking forward
Il y a un projet de réédition. Un label envisage de sortir un coffret rassemblant tous nos disques, un nouvel album s'il est prêt et un cd de morceaux qui seraient remixés par des artistes "maison". Ce serait pour 2006, l'année des vingt ans du groupe. Ce projet "revival" peut être vraiment cool, en tout cas une très bonne surprise plutôt flatteuse d'ailleurs, je n'aurais jamais imaginé un truc pareil.

Just to be safe
Nous avons vraiment des amis, depuis super longtemps, des gens qui sont là. Cobalt, par exemple, a toujours été précieux pour nous. Six ans après avoir été en éditions chez lui, nous restons proches. Il nous a souvent prêté de l'argent (que nous lui avons toujours rendu). Nous avons une super relation humaine avec lui. D'ailleurs, sans ce type d'histoire affective dans notre parcours, nous serions inexistants.

Tango, Macumba, Teknosof
En France, la plupart des musiques sont rassemblées sous quinze étiquettes et nous ne correspondons à aucune .. il faut qu'on s'en trouve une ! On est donc pas étiquetés. Ce qui est sûr, c'est que nous ne faisons pas de musique expérimentale, ce n'est pas la "caricature" de ce public que nous souhaitons autour de nous. Nous voulons des gens de tous les âges et de tous les bords ! Sur scène, il y a un côté très rock et très humain, ça peut déconcerter et dérouter les gens qui ont surtout aimé les aspects "opaques" de nos disques. Nous ne faisons pas de la musique intello et on se sent bien quand notre humour transparait. On veut que ce soit généreux, souriant, pètant, superfacile dans la relation. Après les sons, évidemment, il faut s'y faire ...

The third fish
On a été en trio pendant sept ans, de 92 à 99, avec Kazi notre bassiste. Puis, après son départ, nous sommes redevenus le duo que nous étions à nos débuts. Il est parti 4 mois après "Indoor", ca se sentait qu'il allait "filer". Pour notre dernier enregistrement commun, l'ambiance a été plutôt "lourde" bien que notre amitié n'était absolument pas mise en doute .. on bossait au casque la nuit, à la maison .. ce qui ne génère pas une ambiance de fraîcheur, c'était même plutôt sombre comme affaire mais bon il y a des tordus qui aiment ca (chouette!) et nous avec le temps on finit par lui trouver plein de qualités à cet album, faudrait qu'on le remasterise, on a merdé total cette phase finale.

What a disaster
Nous avons un pote qui fait le travail visuel des pochettes depuis le départ. Il avait notamment créer le personnage du "crétin" qui illustrait Double Nelson. Nous avons sacrifié ce "monstre" en 96, une fois qu'il a eu fait la pochette d'un maxi. Un dégât total d'ailleurs cette affaire de maxi, il est sorti aux USA en vynil quatre titres puis Musidisc l'a repris en France mais il le vendait 70 balles pour 9 minutes de zic ! On était totalement contre mais ils l'ont fait et ils en ont vendu cinq !! C'est la seule fois où on a repris deux titres sur le disque suivant.

Keep the model
Nous avons fait un effort pour "...vs. double nelson". En enregistrant et composant de nouveau à deux, nous avons pris le parti de minimaliser la chose. On voulait valoriser le côté duo et être le plus proche possible de la musique à deux que de la musique à dix. D'où notre volonté de tailler et de ne pas superposer les couches. Nous avons enregistré ce disque sur la scène du "Magasin 4" à Bruxelles, une salle gérée par des potes. On est arrivés le 1er juillet 02 avec 4 ébauches, on est "ressortis" le 31 août avec 21 morceaux mixés. C'était cheap comme moyens pour enregistrer mais on était vraiment dans une situation de confort "mental".
Il y avait de la sérénité dans l'air. Notre expérience de studio remont à un bout de temps même si nous y avons fait la moitié de nos disques, les galères d'argent nous ont conduit à travailler autrement et ca nous plait. On est contents de nos conneries.

Edward J. Sutton Davis
On a un autre personnage récurant, Edward J. Sutton Davis. Il tient particulièrement au coeur du Pasc. Sur notre site, on peut lire plein de petites histoires inspirées par ce mec et sur la pochette de notre dernier disque il y en a des extraits. C'est sans doute pour améliorer notre com ( ).
C'est certain qu'on a quelquechose à dire mais on pensait que ca s'entendait .. il semble que non.

Jamais on ne m'invite
Avec les programmateurs, nous devons avoir beaucoup de discussions et d'échanges pour convaincre, c'est assez épuisant d'avoir à s'expliquer, surtout qu'avant toute chose on veut seulement jouer. On en a envie, on adore ca. Alors, que l'on nous programme avec Mass Hystéria, Young Gods - c'est déjà plus cohérent - ou des rappers japonais, peu importe, on veut jouer et c'est pas plus mal quand ce n'est pas avec nos "clones" si tant est qu'ils courent les rues. Malheureusement j'ai beaucoup de mal à trouver des dates. J'aurais bien voulu qu'il se passe quelquechose avec la sortie de ce nouveau disque mais rien n'est arrivé.Nous sommes en échec permanent mais on en souffre pas, va savoir pourquoi !

Dèche
On fait au mieux pour ne pas être trop "discrets" mais on doit développer nos sources de communication par cinquante, pas facile à deux à tous les postes. On n'intéresse pas les agents, on n'est pas rentables, alors maintenant je fais aussi le booking. Pas facile, mais je crois que personne ne regrette de nous avoir fait jouer, on laisse toujours aux gens des souvenirs plutôt "flamboyants".

Jour J
Pour les concerts et sur la route, nous sommes six. Un au son, un à la lumière, deux factotum de nos amis qui grimpent, qui montent, et sur qui repose toute la qualité de la soirée (hem) + nous deux sur scène.
Nos concerts ne sont pas du tout improvisés, des bandes tournent, mais on peut quand même se permettre certains dérapages .. on se permet.

X-Vision
Après nos concerts, on essaie de projeter les court-métrages SF de notre pote (série Z') dans lesquels on a trempé et nos "productions" vidéo. Elles nous sont inspirées par la musique et on s'invente des ambiances, des couleurs, des scenarios. On vient de réaliser quatre clips en un mois. On en diffuse ainsi une dizaine -beaucoup de figuratifs, peu d'abstrait- et c'est super cohérent avec ce que tu as dans les oreilles. La musique reste notre priorité. Nous sommes avant tout des musiciens ... qui ne se prennent pas au sérieux. Nous nous sentons bien dans ce truc. On se régale et on a la sensation permanente de s'améliorer.

You will understand
Nous faisons ce que devrait faire tous les mecs qui font de la musique : ce qui leur passe par la tête. Il faut que ca passe d'abord par toi pour que cà touche ensuite les gens.

Quel champion vous êtes
Nous sommes toujours à fond, dès qu'il y a un break, on le met toujours à profit pour faire de la nouvelle zic ou des images ou des trucs débiles ( ). Pas le temps de faire autre chose !

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"L'Oeil Electrique" (Rennes) - mai 99 -

C'est arrivé près de maintenant.
Pask, Gaze et Kazi voyagent beaucoup, donnent des concerts mutins, enregistrent des disques bizarroïdes, créent des visuels insolites, sont acteurs pour des court-métrages dont ils signent les BO. Ils s'amusent tout le temps et ne pensent qu'à ça. "Indoor" est un nouveau voyage à travers leur rock hypnotico-loufoque. Sombre et délirant.

Gaze : Chacun s'implique dans cette histoire en fonction de ce qu'il sait faire et de ce qu'il a envie d'y faire. On ne se pose aucune question quant aux directions qu'on prend et aux choix qu'on fait. Tout ça s'impose très naturellement. Le truc Double Nelson est finalement pour nous quelque chose d'assez précis pour sentir immédiatement quand on est à côté de la plaque. Notre fonctionnement est un peu particulier du fait que nous n'avons pas de local. On a un un kit de matériel dans notre appart qui nous permet de jouer, répéter et enregistrer, mais le tout au casque. On enregistre tout ce qu'on a sous la main : frigo, guitare, basse, clavier, un mec bourré de passage... Nous ne sommes pas des musiciens très "techniques". Régulièrement on va se poser dans un endroit où on peut faire du bruit pour refaire certaines parties en "live", utiliser une batterie...
On stocke en permanence de la matière.
Comment avez vous préparé "Indoor" ? Il est plus sombre que vos précédents albums.
On a commencé à "collecter des trucs" en été 97 et le 1er janvier de cette année on a installé l'appart façon studio et enregistré-mixé tout le stock en 31 jours. On a fait beaucoup de choses la nuit, au casque, en faisant gaffe à ne pas faire grincer le plancher en allant aux chiottes. Quand on n'en pouvait plus on allait prendre des tôles au bar du coin (on est des accros du "troquet"). Ce n'était en rien une manière sombre de faire les choses, juste totalement claustrophobe. Et puis, enregistrer avec un volume ridicule et souvent dans le noir t'amène à faire des choix différents de ceux que tu aurais fait avec des enceintes ou des amplis qui te pètent à la tête. C'est peut-être pour ça qu'il peut te paraître sombre. Nous on est loin d'être des gens sombres, mais comme tout le monde, on est un peu plus foncés la nuit.
Depuis vos débuts, votre musique s'apparente au psychédélisme. Est-ce volontaire de votre part ?
Quelle serait votre définition du psychédélisme et de la musique psychédélique.
Pourquoi pas... Mais pour moi dans le psychédélisme il y a la défonce. De ce que j'en connais les meilleurs groupes psychédéliques étaient des défoncés. Nous nous ne sommes pas dans la dope. Juste suspects. Le seul truc psychédélique qui me tiendrait à coeur, c'est qu'en écoutant notre zique les gens aient des sensations physiques, les pupilles qui se dilatent ou se rétrécissent, qu'ils perdent tous leurs points de repère et se laissent aller. Oui, en fait ce serait cool que DN génère les effets d'une dope, je n'aime pas la réalité, je la trouve ennuyeuse, désespérément stagnante et construite sur des bases de données fausses et restrictives. La réalité pour moi n'est pas naturelle, elle fait flipper les gens, leur fait se poser des questions à la con et les rend peureux.
Vos concerts sont différents de votre travail en studio. Quels instruments utilisez-vous ?
Certains morceaux sont joués à trois guitares, à trois basses ou uniquement avec des percus ; on a des bandes d'arrangements sur Adat. L'important étant de générer un climat que nous avons bien en tête. On essaie aussi de mettre un maximum d'informations pour les yeux et de fabriquer une espèce d"espace-temps" parallèle à consommer tel qu'il vient, sans intellectualisme de mes deux ; on accroche des toiles, on installe des télés, des lumières un peu perso et on donne le meilleur de nous-mêmes... bref, c'est très "humain", c'est plein de failles et de défauts et c'est super agréable d'y aller à fond.
Je m'étonne que vous ayez autant de mal à jouer en France !!
Disons que nous avons quelques difficultés, mais, bon... On est sorti du pays dès nos débuts et on ne s'est jamais acharné à être super présents ici. Ceux qui nous font jouer en France prennent des risques ; il n'est pas évident d'avoir du monde aux concerts. C'est pareil partout... mais par exemple en Allemagne c'est plus facile, les entrées de concerts sont à 15 balles. Ca génère plus de curieux, ou simplement la visite des gens qui s'emmerdent chez eux. Notre galère en France vient aussi du fait que les organisateurs se demandent où nous caser dans leurs programmations et avec qui nous faire jouer. Sans faire de mauvais esprit, j'ai quand même l'impression que ce concept d'étiquetage et de cohésion des soirées est typiquement français. A ce titre là tous les groupes qui font des choses personnelles ne peuvent pas jouer ici. Le moule est trop pesant. En Hollande, tu te retrouves entre une violoniste acoustique tchèque, un groupe de punks japonais, des DJ's et des chants corses. Ca ne pose aucun problème au public. Les gens sont même contents de découvrir des trucs qu'ils n'avaient pas prévus et qui les font flasher. En bref, j'ai l'impression que le syndrome du fan club et de l'esprit grégaire est moins entretenu (cultivé) ailleurs.
Penses-tu que l'état soutienne correctement les métiers du spectacle ?
L'état ? Qu'est ce qu'il vient foutre dans cette histoire !? Pour moi, une des forces de la musique réside dans la possibilité de la faire en toute liberté, je ne suis pas loin de penser qu'un musicien rémunéré en tant que musicien n'est plus libre de ses choix. Admettons qu'en ce qui me concerne je trouve antinomique et dangereux d'être payé en tant qu'"artiste". Par contre, faire rentrer de l'argent dans une entreprise c'est vital, sinon elle ne perdure pas. L'argent doit exister pour être ré-injecté et impliquer de ce fait l'autonomie qui te permettra d'envoyer péter ceux qui pourraient avoir un contrôle sur la création parce qu'ils la soutiennent financièrement. En ce qui concerne les "métiers du spectacle" ça me fait instinctivement frémir. Les techniciens je comprends, mais musicien c'est pas un métier. Ce serait bien sûr cool d'en vivre mais il n'existe pas de statut sain pour l'esprit. Pour l'instant la situation est aberrante.
Comment vous en sortez-vous financièrement ?
On s'en sort mal nous perso mais le groupe est autonome, apte à se manager et à s'autoproduire en disques et en vidéos. Je ne conseille d'ailleurs à personne de suivre cette voie s'il a l'intention de se mettre des thunes dans la poche. Après tu me demandes pourquoi on fait ça ... on a qu'à dire que notre vie est super riche et qu'on en changerait pour rien au monde.

(Propos recueillis par Wilfried Jaillard)
"Joie de vivre et nouilles en salade" (Lyon) - juin 01 -

Alors bon, c'est dur d'en parler, en fait "La Chôse" a fait jouer Double Nelson au "Pezner" le 22 mars ...Pas la peine de faire une biographie, ils jouent depuis 86, font une musique hors normes, déroutante, noïse, inquiétante ... plus de 48 heures passées avec ces phénomènes que sont Gaze & Pasc ainsi que ceux qui les entourent (Jedi, Lucien, Roll.k, Boon's), un superbe concert (avec Isp en excellente première partie), intense, rebelote le lendemain à Annecy ... et un retournage de cerveau plus tard on avait oublié de faire une interview, chôse faite par mail avec Gaze quelques jours après ...
Alors le bilan de cette tournée ?
Cool de jouer un peu dans l'héxagône. Ca faisait un peu trop longtemps, on croyait même qu'en France c'était presque devenu impossible de "faire les choses à l'inspiration" ; les commissions de sécurité, les décibelmètres, les murs fraîchement repeints, les salles sans bar, les concerts à 20h, les entrées à 40 balles ... et toutes ces conneries qui n'ont rien à voir avec le chmilblick ... bon y en a plein des salles comme ça mais quelques résistants nous ont permis de respirer, alors roule ma poule.

Double Nelson existe désormais en duo, quelles sont les raisons du départ du troisième ?
Les galères de blé sans fin et sans fond.

Qu'est-ce qui vous motive encore pour avoir toujours autant l'envie de tourner et de faire des disques ?
Là, précisément, en ce moment même, je ne vois pas une autre vie qui me tente.

Qu'est-ce que vous avez travaillé ou retravaillé pour que celà fonctionne toujours en duo ?
Le mental mon colonel.

Comment vous débrouillez-vous pour être toujours autant en marge de la scène française et étrangère ?
Tu veux dire en marge de tout alors ?

Y a t'il des groupes dont vous vous sentez proches ?
Je suis la reine des incultes. Comme ça, à brûle pourpoint, et pour éluder la liste des groupes que je devrais connaître ( ), je dirais un peu tous ceux qui font les choses sans avoir rien à perdre, qui se risquent à déplaire, à décevoir, les chiants, les lourds, les "à fond", les énervés du bocal, les faillibles (et magiques par moment du coup ... des fois) ; ça ça serait un peu pour mon côté intello (de mes deux tu le rajoutes si tu veux), et sinon de l'autre côté (mais lequel alors) les musiques qui grincent mais pas dans "l'opaque", la veine énervée des bons groupes japonais (des concerts qu'on n'oublie pas), le blues africain, quelques fââââmeuses lignes de basse disco ... plein de zic en fait.

Comment bossez vous vos morceaux ? est-ce qu'il y a des règles établies ?
Bosser ! plutôt crever. La musique chez nous ça se fait over lentement, que quand on en a envie, mais ouais la règle par contre c'est de l'avoir tout le temps dans la tête.

Y a t'il une part d'improvisation dans vos morceaux ?
Quand on enregistre c'est évident puisqu'il y a un maximum de premières prises/premiers pets qui sont gardés, en conce la bande a un début et une fin et nous on a carte blanche au milieu ... alors on se permet parfois ... euh même de plus en plus souvent ...

Où est passée la 7ème compagnie ?
Dans ton cul.

On a rarement vu un groupe qui a sorti autant d'albums sur autant de labels différents, pourquoi donc ?
J'en sais rien moi. A la base on va là où on veut de nous.

De quoi parlent vos textes en général ?
C'est clair qu'on n'a jamais mis en avant notre puissance d'écriture (...) mais des fois ça raconte des trucs ... le Koursk ... ou cette espèce de paumé qui a pris le pouvoir dans une ville de débiles ... ou l'histoire d'un jeune homme honnête, performant, dynamique qui doit mourir parce-qu'il fait chier ... ou "viens dans mon carton je te ferais voir la mer" ... ou des fois des histoires d'Edward J. Sutton Davis un vieux pote à nous qui n'existe pas.

Est-ce que vous répétez toujours au casque ?
(il me semble qu'il y avait une rumeur à propos de ca ... non ?)

On n'a pas de local depuis au moins dix ans parce-qu'onn n'a pas le blé pour avoir une barraque dans laquelle on pourrait vivre et faire du bruit et comme on se sent incapables de se filer rencard dans un lieu pour y être "créatifs" sur commande, on a pris le parti de faire de la zik en slip dans notre deux pièces quand ca nous traverse la tête. En plus il y a un truc dont on se régale finalement, c'est que quand on se retrouve en condition de conce il y a un max de facteurs inconnus (la batt à l'appart on la répète en tapant sur la table de nuit), et ca fout les jetons, et ça pète la tête.

Comment est-ce que vous arrivez à gérer votre carrière de musiciens avec celle d'acteurs ?
Ouais c'est un peu pompeux tout ça et ça ne correspond pas à la réalité. Mais bon, sans s'étaler sur le sujet acteur c'est se bloquer trois semaines dans une année, le plus long c'est de faire la zik, le son, les ambiances pour ces films. Jusqu'à présent les tournages & post-prods se sont toujours insérés entre deux albums et tant mieux parce-qu'effectivement ça semble impossible de mener ces deux histoires à fond au niveau de la tête dans le même espace temps. La chienlit par contre c'est que du coup on n'a jamais le temps de s'enmerder assez et ça c'est le vrai problème.

Les court-métrages sont vraiment classieux, à quand le prochain ? quels rôles jouez-vous ?
Le prochain il a été tourné il y a presque deux ans et depuis il était en standy pour des histoires de blé (comme d'habe). Il y a un max de boulot images ordino à faire sur ce court-métrage qui n'a pu s'amorcer que récemment, le réalisateur "le gros Ramm" élégament surnormmé le "bourrin de Champigneulles" a taffé pendant deux ans dans des boulots à la con pour avoir la thune pour acheter la bécane et les logiciels 3D et compagnie. On a vu il y a quinze jours des petites parties qu'il a montées et bossées au niveau des décors/effets spéciaux, ça a l'air vraiment bien parti. Je dirais même que ça a l'air de péter dans le tube. Dans cette histoire, "Zazen", le Pasc c'est Zazen, une espèce de mec du futur plutôt "perturbé" qui a été "choisi" pour mener une révolte contre un pouvoir ancestral... Quant à moi sur ce tournage je faisais "machine à fumée" "factotum", équipe B quoi !

Vous vous sentez proches de votre scène locale ? : groupes, assos, bars ... ?
Très proches du bar "Le Royal" ...

Allez, vous avez une anecdote croustillante ?
Une fois on a bu, après on été saouls et on a hyper rigolé.

Une blague ?
Un homme entre dans une boulangerie : "Bonjour - parce-qu'il est poli - est-ce que vous avez des chterfourzeuahf au chocolat ?" Et la boulangère - qui est super - de répondre :
"Des chterfourzeuahf à quoi ?"

Est-ce que vous avez toujours tourné avec la même structure de décors ? Bref, une sorte de concept ?
Yes, toujours avec un "décor" mais pas toujours le même. Ca déstresse de construire sa "chambre" sur scène avant de jouer et de "rhabiller" les salles. On a qu'à dire que c'est plus facile à "vivre" d'être l'hôte plutôt que le visiteur.

Il y a quand même tout un univers visuel autour du concert et des disques comment c'est venu ?
On est plutôt sensibles à ce qu'on a sous les yeux pour faire de la zik (va savoir pourquoi) et du coup pour la restituer du mieux possible il faut que les images qui nous ont "transporté quelque part au milieu de nulle part" existent aussi pour ceux qui veulent bien tendre une oreille à nos conneries.

Est-ce que vous faites toujours appel aux mêmes gens ?
Il y a un vivier de potes à Nancy qui ne sont franchement pas des berlingots, vraiment des bons. On serait des imbéciles si on changeait de "cheval". La galère depuis trop longtemps c'est qu'on est franchement mal de n'avoir pas de blé à leur filer en contrepartie, alors on fait de plus en plus de choses tout seuls.

Elle n'est pas un peu longue cette intervieuw ?
Je dirais plutôt qu'elle n'est pas courte.

Je ne sais pas si vous avez appercu la rubrique phrase mytique du fanzine ...vous pourriez pas nous en pondre une ?
Les petits derniers pour la route en disent long sur le chemin qu'il reste à parcourir.

Alors c'est quand ce nouvel album ?
On se casse juillet et août à Bruxelles dans une salle de conce pour enregistrer et en septembre on fera comme d'habe, on enverra des démos, après restera à attendre les commentaires de ceusses qui voudront bien prendre la peine d'en faire. Si un label est intéressé ça peut sortir vite, et si personne ne bouge on a d'autres solutions pour le sortir. Alors ... au pire ... fin du premier trimestre 2002 ?

Comment faites-vous pour être aussi cool ?
On en prend.
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"491" (Lyon) - mai 99 -
Ça y est, c'est reparti pour le trio nancéen non conformiste. Sillonner le pays dans tous les sens pour réinventer leur musique une fois sur scène. Un nouvel album "Indoor", paru le mois dernier chez Pandemonium et quelques questions pour la route. Echange rapide avec Pasc juste avant que leur camion ne les enmène au pays du cassoulet. Double Nelson : l'envie intacte.
Sur la route justement, c'est surtout là que vous avez envie d'être ?
Etre sur la route c'est comme être éveillé.
Toujours un peu dur au début, mais après c'est parti "jusqu'au bout de la nuit".
DN, une vie de nomades ?
Pas vraiment. Ce qui est plaisant c'est la cassure de rythme. "partir un jour..."
"Indoor" nouvel album complètement home made ? But de la manoeuvre ?
On pense que le fait de s'isoler dans un endroit inconnu nous aide à faire un disque.
Alors on a essayé de faire le contraire.
Après de bons et loyaux services, nouvelle évolution-transition sonique ?
Bons et loyaux services c'est vite dit. Nouvelle évolution sonique...... on fait des trucs et des machins pour s'occuper la vie.A partir de là, le but ultime reste extrêmement lointain
et c'est tant mieux comme ça.
On a l'impression avec cet album que vous avez réussi à recréer des ambiances hors catalogues ?
On s'est retrouvé un peu perdus à faire ça chez nous. Notre instinct nous a sûrement conduit vers d'autres rivages. Espérons pour nous qu'ils soient accueillants. Sinon, il faudra tout péter.
Par rapport à ce que l'on pourrait appeler les marges de la scène française, n'y a t'il pas un risque de confidentialité pour la diffusion-partage de votre musique ?
La diffusion nous pose un problème.
Et pourtant nous n'essayons de faire que des tubes dont on ne se lasserait jamais.
Le naturel revient au galop, le vôtre sur scène c'est plutôt sourires et saturation extrême,
voire même parfois le kitch ?

Quand on est sur scène c'est difficile de faire jouer à trois personnes différentes la même musique sans qu'elle soit parfaite et qu'on ait envie de la refaire le lendemain.
Ca nous fait sourire et la saturation ça aide bien.
Etes-vous un jour tombés sur la tête ?
Pas du tout. "Nous sommes quelque part au fond de quelque chose" (d'après S.P)
Entre disco-nights et prises de catch, votre coeur balance ?
Pas plus que ça, mais quand même ; tout ce que ça représente nous parle ; y en a d'autres comme "starship trooper", la mirabelle ou Nancy qui bat Metz 1-0.
Le plaisir, le maître-mot ?
Non. L'envie.
Vous redécorez souvent les endroits où vous jouez avec des toiles.
Quel est le concept en marche derrière cette action ?

On aime bien donner l'impression qu'on vient nous voir chez nous.
La part des machines dans votre vie, voire dans votre musique ?
Elles ont intérêt à être très gentilles. Sinon, on fait avec.
Ca vous avait fait quoi de jouer devant des étudiants groguis au coca-cola la dernière fois
(nuit du Petit Paumé à Lyon) ?

"Qu'il est enivrant de découvrir de nouveaux mondes, de fouler de son pied des sols étrangers"
Pour finir, si on se grillait une "chmère" ?
Fais gaffe à ton briquet.
Bon à très bientôt et merci pour la frappe.
De rien.
(Propos recueillis par Zine)
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